1863. La demeure aux nombreuses colonnes ornant la façade brûlait à feu vif alors que les coups de fusils rugissaient non loin. C’était une bien triste période que vivait la Caroline du Sud à ce moment-là. L’Union l’avait chassée de chez elle afin qu’elle ne court aucun danger, sa famille également. Son père, sa mère, ses deux frères, tous étaient réfugiés long de là, loin du lieu de bataille. Pourtant, elle voulait le revoir, lui, l’homme qu’elle aimait et à qui elle avait dit de se rendre près de la cabane d’esclave derrière la maison.
Discrètement, elle réussit à fausser compagnie à sa famille et se mit à courir aussi vite que sa toilette le lui permettait. Ce fut ainsi qu’elle découvrit l’horreur des flemmes dévorant tout ce dont sa famille avait fait l’acquisition au fil des années, des siècles. Des soldats patrouillaient mais elle réussit à les éviter sans se faire voir. Mais alors qu’elle courrait vers la petite cabane, elle entendit sa voix l’appeler et un coup de feu rugir. L’homme tomba à terre, un soldat de l’Union venait d’abattre son ennemi Confédéré. Elle se rua vers lui à toute hâte et s’agenouilla auprès de son corps mourant. En pleure, elle lui promit de l’aider mais l’homme perdit la vie avant la fin de sa phrase.
Alors, dans un dernier élan de tristesse, elle déposa ses délicates lèvres contre les siennes encore chaude et teintée de sang. Elle posa une de ses mains sur le torse de l’homme et récita l’Incantation proscrite par sa famille et les esprits. Ses mots fusaient avec une détermination flagrante :
« Vitas Phasmatis, Ex Salito, Revertas Phasmatis. Ut Vectas, Vitas Phasmatos, Ex Salito.»
Mais si ce sort s’avérait être interdit, c’est en partie à cause des dangers qu’il représente et la sorcière allait en devoir en payer le prix. Aucun sorcier ne peut ramener quelqu’un à la vie sans conséquences. Son amant revînt à la vie comme convenue, mais elle subît un sort plus terrible encore…
Les ténèbres la consumèrent tout entière et, ayant perdu toute émotion, tout amour, tua de ses propres mains l’homme pour qui sa vie venait de basculer à tout jamais. Mort, elle se releva et se dirigea sur les lieux de la bataille afin de tuer chaque homme présent. C’est ainsi que Charlotte Marie Kane maudit ses descendants dès que ces derniers atteindront l’âge de 20 ans tout comme elle…
Cent trente-sept années se sont écoulées. Un matin d’hiver de Janvier 1990, le 21, naquit Zus Middelton à l’hôpital de Mystic Falls, petite ville de Virginie. Il grandit dans cette petite ville sans histoire dans un épanouissement des plus total bien que seul son père l’ait éduqué. En effet, sa mère, après sa naissance, avait préféré devenir une créature de la nuit demeurant à l’âge de 24 ans pour l’éternité. C’est donc son père qui dût lui apprendre l’art de la magie ainsi que l’histoire de la famille et sa malédiction lorsque le garçon eût atteint l’âge de comprendre ces choses. Il comprit donc à 9 ans que dans onze années, il serait « appelé ». C’est-à-dire qu’une pleine lune révèlera son côté ténèbres ou s’il restera tel qu’il est. Heureusement pour lui, il possédait une amie nommée Illiana qui le rendait plus humain. Elle ne connaissait pas cette facette de Zus tout comme sa sœur jumelle, Leila. Mais lorsqu’elles déménagèrent du jour au lendemain, Zus se sentit abandonné au seuil de l’adolescence. Il vécut donc une adolescence assez solitaire, les gens le trouvaient bizarre. Son père, un sorcier resté lui-même à l’Appel, en avait bien conscience alors ils partirent vivre à New-York. Là-bas, Zus continuait de pratiquer la magie par le biais d’incantations, apprenant à surtout ne jamais utiliser le sort interdit.
A l’âge de dix-neuf ans, il retrouva la trace de sa mère, qu’il n’avait jamais rencontrée. Il espérait pouvoir entrer en contact avec elle enfin, découvrir pourquoi elle l’avait abandonné. Et lorsque ce fût enfin le grand jour, il se sentait assez anxieux et nerveux à l’idée de la voir pour la toute première fois. Une nuit, à l’angle de la 42ème rue, il parla pour la première fois à Esmeralda Middleton. Il apprit que depuis quelques années, elle l’observait de loin, donnant des détails précis qui ne pouvaient que montrer la véracité de ses propos. Alors qu’ils marchaient dans les rues, une créature surgit tout à coup. Zus fût propulsé contre le mur de la ruelle et tomba inconscient. A son réveil, il se sentait un peu sonné. Sa mère, quant à elle, l’appelait en pleur. Une mare de sang l’entourait, plusieurs morsures distinctes sur son corps. Il essaya de la calmer mais ne sachant pas pourquoi elle ne pouvait guérir, il appela son père en urgence.
Celui-ci arriva quelques instants plus tard. Il fut surpris de voir le jeune homme avec sa vampire de mère mais la détresse de son garçon était si grande qu’il ne s’y attarda pas plus que ça. Sa mère se mourrait. Zus supplia son père de l’aider à la maintenir en vie. Mais malheureusement, rien ne peut guérir une blessure loup-garou d’après son père. Après une grande force de persuasion, Zus réussit à convaincre son père d’utiliser le sortilège interdit. Dans cette ruelle plongée dans le noir, les deux hommes se prirent la main, anxieux de ce qui pourrait arriver.
Les mots se répètent encore.
Vitas Phasmatis, Ex Salito, Revertas Phasmatis. Ut Vectas, Vitas Phasmatos, Ex Salito. Vitas Phasmatis, Ex Salito, Revertas Ph Et encore. asmatis. Ut Vectas, Vitas Phasmatos, Ex Salito. Vitas Phasmatis, Et encore… Ex Salito, Revertas Phasmatis. Ut Vectas... au-dessus du corps désormais sans vie de la femme. Le sang coule de ses narines, du coin de ses yeux mais rien n’a d’importance en dehors de l’enchantement. Il le répète encore et encore jusqu’à entendre un bruit sourd. Il sentit son cœur se briser en mille morceaux, tous ses membres se mettent à craquer un à un. La douleur lui fait pousser des cris stridents. Il sent la douceur et la fraîcheur de la lune illuminer son visage.
Le corps de son père était étendu devant lui, mort. Sa mère ne bougeait pas plus que lui. Le sort n’avait pas fonctionné… mais Zus venait de ruiner non seulement la vie de son père mais la sienne également. Une dernière larme coula le long de sa joue avant qu’il sente une puissance surnaturelle envahir son être entier. L’Appel. Il devenait ténèbres.
Puis : NOIR TOTAL.
Mes yeux s’ouvrent petit à petit. Le goudron de la ruelle est dur. Mes oreilles sifflent, ma tête tourne, mon crâne et mes membres me font mal. Je me relève en posant une main au sol comme appuie. Je regarde les deux corps face à moi. Pathétique. Une mère trop attendrit par son petit garçon qu’elle a abandonné qui est morte en le voyant pour la première fois. Cette ironie me fait pousser une léger rire. Et un père tout aussi pathétique, renonçant à ses principes sachant pertinemment ce qu’il risquait pour satisfaire les caprices de son fils chéri.
« Phasmatos Incendia. »
La ruelle est envahie d’une sensation exquise de chaleur. Souriant, je pars de la ruelle, le corps de ceux qui furent mes parents brûlant sans aucune discrétion.
2013. Les locataires de James Middleton se tirent enfin de chez moi. Je peux emménager de nouveaux dans la petite ville tranquille de Mystic Falls. Il paraît que des choses intéressantes s’y passent désormais. J’ai entendu dire que de vieux vampires sont en promenades dans le coin. On peut toujours aller voir ce qu’il en est, voir si c’est possible d’en drainer un ou deux…
Le regard plein d’ambition, je balaye la rue qui a bercé mon enfance avec intérêt, mon sac de sport sur mon épaule. Je prends une grande respiration et entre en refermant la porte derrière moi. Nouvel arrivant en ville mes chéris…